Les doublages de Crunchyroll - Le Bilan (Seconde Partie)


  Bonjour à tous et à toutes, et bienvenue dans cette seconde partie de ma série en trois articles destinées à faire un petit bilan des doublages de Crunchyroll de leurs débuts en 2017 jusqu’à aujourd’hui. Après avoir traité de leurs premiers doublages en ce qui concerne leurs catalogues, réalisés via l’entreprise belge SDI Media, puis de leurs simuldubs, réalisés à partir de 2020 en France chez Time Line Factory, ainsi qu’en Belgique chez Lylo Media Group, il me fallait inévitablement faire un assez long aparté afin de parler des doublages d’un certain service de SVOD qui a fusionné récemment avec Crunchyroll, ce service en question, sans aucun suspens, c’est Wakanim. Pourquoi faire cela me direz vous ? Car après tout, on pourrait se dire que la disparition de ce concurrent ne change rien dans la production des doublages, et à cette affirmation, je ne peux que répondre oui… mais non ! Car dans les faits, cette fusion a fait que d’anciens employés de Wakanim, voire certains cadres dirigeants, se sont retrouvé à travailler du jour au lendemain chez leur concurrent d'alors, et cet élément est très important, dans le sens où ils ont, à leur façon, fait évoluer la façon de faire du doublage dans leur nouvelle entreprise, d’autant que des projets de doublage lancés par Wakanim se sont retrouvés ensuite sur Crunchyroll, nous y reviendrons bien entendu dès que nous en aurons l'occasion. Ainsi, avant d'évoquer le studio interne de Wakanim puis Crunchyroll et en faire un bilan, dans une dernière partie, de ce qu’ils ont apporté, en bien comme en mal, aux doublages de ces derniers à partir de 2022, il me faut nécessairement faire un petit historique de l’activité de doublage faite en sous-traitance par Wakanim, de leurs débuts en 2016 avec le simuldub de Drifters, en partenariat avec J-One et Alltheanime, jusqu’à l’annonce de la migration de catalogue vers Crunchyroll en mars 2022, qui signe plus ou moins le début de la fin de la plate-forme.

II. Les doublages externalisés de Wakanim, des débuts jusqu’à 2022...

  A- Le cas Drifters…

  Mais pour cela, il nous faut revenir assez loin en arrière, le 9 octobre 2016, très précisément. En effet, cette journée-là, Wakanim, après 7 années d’existence et un peu plus d’un an après avoir été racheté par la société japonaise Aniplex, filiale de Sony, se décide à se lancer dans un simuldub, et ce, bien après la production, en collaboration avec IDP, plusieurs années auparavant, de la VF de la saison 1 de Sword Art Online, réalisé pour une sortie en DVD/Bluray, et qu’ils ont récupéré pour leur plate-forme SVOD la même année. Cependant, ce lancement s’effectue dans une certaine prudence, notamment en raison de l’investissement conséquent que cela représentait à ce moment-là pour l'entreprise. Ainsi, pour ce faire, Wakanim conclut un partenariat avec la chaîne de télévision J-One, détenu par le groupe MTV (Paramount), ainsi qu’avec l’éditeur vidéo Alltheanime. J-One profitait de l’exclusivité de pouvoir diffuser la série 1 heure après la mise à disposition sur Wakanim, en VOSTFR, tout comme la possibilité, celle qui nous intéresse ici, de proposer le même épisode 1 jour plus tard avec sa VF. De son côté, la plate-forme, en plus du simulcast, pouvait mettre en ligne l’épisode pour ses abonnées payants, en VF, 14 jours après que JOne l'ait proposé. Enfin, Alltheanime récupérait les droits vidéos de ce doublage si sorti en vidéo il y avait. Il s’agissait d’un accord qui était donc gagnant-gagnant pour les trois entreprises. Malheureusement pour eux, ce simuldub ne se passa pas comme il l’avait escompté. En effet, d’importants changements de voix eurent lieu tout au long des épisodes, parfois plusieurs fois sur le même personnage afin de respecter le rythme de diffusion, si bien que J-One et Wakanim n’eurent d’autres choix que d’interrompre à plusieurs reprises le simuldub, pour la reprendre ensuite en janvier 2017, une fois la série achevée en simulcast. Ce fut donc un échec, qui poussa Wakanim à ne pas renouveler cet essai pendant plusieurs années. Quoiqu’il en soit, de son côté, la série fut rediffusée intégralement un an plus tard sur J-One et sortit ensuite en bluray VO/VF chez Universal en décembre de la même année, en partenariat avec Alltheanime.

  Tout cela étant dit, me direz-vous, que vaut cette VF, surtout au vu de la catastrophe industrielle qu’elle a été en termes de réalisation ? Eh bien, il y a du bon, comme du moins bon globalement. Pour ce qui est de la partie technique, ce simuldub a été produit dans la filiale belge du studio Lylo Media Group, dont nous avons déjà parlé dans la précédente partie, qui est un mastodonte du milieu, travaillant régulièrement avec les chaînes du groupe MTV ou présents sur la TNT comme Gulli, ce qui pouvait augurer du bon comme du moins bon en ce qui concerne ce doublage, en raison de la taille de l’entreprise. La direction artistique de cette VF a été assurée principalement par Erwin Grünspan, un comédien belge très talentueux qui nous a quittés, hélas, en décembre 2021, et qui est connu notamment pour ses doublages sur de nombreuses séries animées, notamment sur la franchise animée « Yu-Gi-Oh! ». À noter, à partir de l’épisode 8, qu’il s’occupe de la direction en collaboration avec Laurence Stevenne, comédienne belge habituée de Lylo, car ayant notamment dirigé la VF des Mystères d’Hunter Street chez eux. Dans l’ensemble, la direction des comédiens et leurs choix sont plutôt bien réfléchis, malgré les changements de voix sur lesquels nous reviendrons. En ce qui concerne l’adaptation, simuldub oblige, mais à contrario de ce qui sera fait plus tard chez Crunchyroll, nous avons plusieurs équipes différentes d’adaptateurs qui se relaient au fil des épisodes. À la traduction littérale des dialogues, nous avons Stéphane Lapie qui s’est occupé de la plupart des épisodes tandis qu’il s’est fait remplacer brièvement par Denys Fontanarosa sur les épisodes 2 et 4. Pour ce qui est des dialogues à proprement parler, c’est Justine Cocquyt qui s’en occuper en grande majorité tandis qu’elle s’est faite remplacé plusieurs fois, notamment par Justine Minard sur les épisodes 2, 7, 11 et 12, ainsi que Louise Fudym sur l’épisode 4. Tout ce simuldub fut entièrement supervisé par Olivier Cervantes, le PDG de Wakanim, en collaboration avec Sylvie Brevignon, qui s’occupait alors de la gestion des doublages chez Alltheanime. Toute cette exposition, assez laborieuse, étant dite, on ne peut que saluer les textes fidèles et respectueux de l’œuvre originale, ainsi que la cohérence des termes dans les dialogues, quel que soit l’épisode.

   Ce point étant évoqué, passons maintenant au cas douloureux, mais nécessaire des différents comédiens qui se sont succédé sur la série, notamment ceux qui se sont fait remplacer sur leur personnage. Tout d’abord, il me paraît impératif de parler de la prestation de Pierre Lognay sur le personnage principal, Shimazu Toyohisa. Ne connaissant qu’assez mal ce comédien, j’avoue l’avoir beaucoup apprécié sur le personnage, il retranscrit très bien le côté samurai et un peu tête brulé du personnage, tout comme son sadisme lorsqu’il s’attaque à certains adversaires. Il en va de même pour Michelangelo Marchese, que je connaissais notamment pour son interprétation de Holland Novak dans Eureka Seven, qui nous offre un excellent Oda Nobunaga qui accentue bien le côté perfide, mesquin et machiavélique qu’hilarant du personnage dans les quelques passages humoristiques de la série. Enfin, pour en finir les personnages principaux, il me fallait parler du choix de doublage le plus controversé que j’ai vu depuis un moment sur une VF, celui de doubler Yoichi Suketaka, un homme, par une femme, à savoir Valérie Lemaître. Pourtant, c’est aussi le cas en VO, où c’est Mitsuki Saiga qui interprète le rôle. La différence, c’est que là où Mitsuki Saiga a la tessiture vocale parfaite pour faire une voix de jeune homme (elle est d’ailleurs connue pour ça), ce n’est pas le cas de Valérie Lemaître. Pourtant, est-ce que sa prestation pose problème ? Bah non justement. Car autant ça choque au premier abord quand on voit que les personnages s’adressent à lui sous le nom de « il », autant il y a des blagues dans la série où ces derniers plaisantent sur son ambiguïté sexuelle, donc pour moi, qu’il soit doublé par un homme ou une femme, ça ne pose aucunement problème, d’autant que Valérie Lemaître est excellente sur le rôle. Bref, pour le casting principal, tout semble assemblé à priori de manière à ce qu’on ait une bonne VF tout du long. Malheureusement, quand on s’attaque aux personnages secondaires, c’est là où le bât blesse pour cette VF qui est victime, en tant que pionnière du simuldub, des trop nombreux changements de voix, certainement à cause d’un manque de préparation, et l’amateurisme qui en découle. Le cas le plus flagrant est le personnage de Abe no Haruakira, doublé dans les premiers épisodes par Alexis Flamant, qui est remplacé à partir de l’épisode 3 par Sébastien Hébrant, le meilleur sur le rôle à mon humble opinion. Ce dernier se fait pourtant remplacer de manière incompréhensible, à partir de l’épisode 8, par Philippe Allard, qui prend un timbre assez étrange sur le rôle, peut-être pour essayer d’imiter Hébrant, avant de prendre ensuite sa voix naturelle dans les épisodes suivants. Un bien gros casse-tête. Il en va de même pour le personnage assez récurrent de Raspoutin qui passe d’Olivier Prémel à Alessandro Bevilacqua à partir de l’épisode 10, tout comme celui du Comte de St-Germi, doublé au départ par le formidable David Manet, qui se fait remplacer à partir de l’épisode 8 par un autre comédien, inconnue, dont je n’arrive pas à reconnaître la voix. En clair, tous ces changements voix sur des personnages secondaires assez importants, sans compté d’autres, moins présents, ont fait que ce doublage était difficilement agréable à suivre, et ce, d’autant que le simuldub fut plusieurs fois reportées, comme je l’ai déjà dit, si bien qu’il devenait un simple doublage de catalogue, de qualité très discutable qui plus est.

Publicité pour le simuldub réalisé par J-One (octobre 2016).

 

  Voilà tout ce que nous pourrions dire sur ce doublage de Drifters, qui malgré des qualités certaines, souffre d’un défaut extrêmement gênant qui a tôt fait de faire d’un échec ce simuldub qui, pourtant, partait sous de bons auspices. Un peu plus de préparation aurait pu permettre, à défaut d’empêcher d’inévitables changements de voix, de les réduire au minimum, et c’est bien dommage. Quoiqu’il en soit, après cet échec, et les reports de sorties qui s’en suivit, il a fallu attendre 3 ans plus tard, en janvier 2020, pour que Wakanim retente l’expérience, cette fois avec un autre animé de 13 épisodes, connus notamment pour son manga, d’assez bonne réputation, Darwin’s Game.

  B- De 2020 à 2022, Wakanim et les simuldubs Hiventy

 Eh oui, effectivement, en janvier 2020, à la surprise générale, Wakanim décida de reprendre les simuldubs, avec, pour commencer, la série animée Darwin’s Game. Le lancement est, une fois de plus, bien médiatisé par la plate-forme, et ce, d’autant plus qu’elle est cette fois seule aux commandes de ce projet, Alltheanime et J-One ayant laissé tomber définitivement l’affaire pour le simuldub. L’investissement était donc assez important pour l'entreprise et potentiellement risqué si le cas Drifters se reproduisait. Ainsi, l’enregistrement des voix de ce simuldub, et les suivants, furent effectué en Belgique, une fois de plus, avec des comédiens belges, le tout chez… Hiventy ?!! Vous me demanderiez, à raison, en quoi cela est surprenant, eh bien, ça l’est, car Hiventy est une société connue d’ordinaire pour ces prestations techniques dans l’audiovisuel, à savoir la postproduction ou la restauration de films, mais pas vraiment pour réaliser des doublages. Et encore moins en ce qui concerne la filiale belge dont on a très très peu d’informations, si ce n’est qu’elle est située à Bruxelles, qu’elle s’est occupée de doublages d’animés et de quelques films, grâce à leur partenariat avec le studio d’enregistrement Dub Fiction, situé dans la ville d’Evere à proximité de Bruxelles, et qu’elle s’occupe en général de la restauration sonore des films, là où la partie visuelle est traitée principalement en France. Bref quoiqu’il en soit, Wakanim leur accorda la confiance pour le doublage de Darwin’s Game, et le renouvèlerons ensuite à de multiples reprises, malgré l’échec de ce simuldub en raison de l’épidémie de Covid-19, avec le doublage de Deca-Dence qui fut diffusé à partir du 22 juillet 2020, puis celui des 2 derniers épisodes de Darwin’s Game, qui n’avait pas pu être doublé auparavant, qui sont sortis en octobre de la même année. Plus tard, ils s’occuperont également du doublage de la série The Day I Became à God qui est sorti à partir du 14 novembre 2020. Durant l’année 2021, ils seront également sollicités par Wakanim afin de réaliser différents simuldubs que les autres studios de doublage travaillant pour l’entreprise ne peuvent pas effectuer, et ce, en quantité très élevée qu’auparavant. C’est notamment le cas début 2021 avec la 1re saison de Mushoku Tensei, la saison 2 des Brigades Immunitaires et son spin-off Les Brigades Immunitaires Black. Wakanim poursuivit cette collaboration ensuite avec la série Les Combattants seront déployés, diffusé à partir du 25 avril sur la plate-forme, suivie en juillet par non pas 2, mais 3 séries, à savoir Les Mémoires de Vanitas, The Dungeon of Black Company et The Detective is already dead. Malheureusement, pour Hiventy, à partir d’octobre 2021, Wakanim décidera de les mettre en retrait des productions de VF, au profit d’autres studios de doublage comme VF Productions, nous y viendront, ou encore le tout nouveau studio interne de Wakanim. Ainsi, ils ne réalisèrent, pendant l’hiver 2021-2022, que le simuldub de la seconde partie de Mushoku Tensei, et ne furent plus jamais appelés par l'entrerprise après de la fusion effective avec Crunchyroll. À ce sujet, on ne peut qu’espérer qu’ils fassent de nouveau appel à eux pour la saison 2 de Mushoku, ou d’une autre série sur lesquels Hiventy a travaillé, afin de préserver une continuité avec ce qui a été fait auparavant.

   Tout cela étant dit, jetons un petit coup d’œil sur cette activité de doublage de plus près, en évoquant les différents acteurs de ces doublages, avec, pour commencer, la direction artistique. On peut constater tous au long des différents doublages qu’elle est confiée à des comédiens qui n’ont, encore une fois, rien à prouver. Pour Darwin’s Game, c’est le fondateur de Dub Fiction en personne, Bruno Buidin, directeur artistique notamment de la VF de High School of the Dead et de celle de Kenshin Le Vagabond, qui s’est occupé de ce doublage, excepté sur l’épisode 7 où c’est Aurélien Ringelheim (Sacha de Pokémon) qui l’a remplacé. Il en va de même pour Deca-Dence où c’est Bruno Mullenaerts (Shinichi Kudo dans Détective Conan et Joey Wheeler dans Yu-Gi-Oh !) qui s’en est occupé, remplacé par Cécile Florin (Sonny Wright dans Inazuma Eleven Arès) sur l’épisode 7. Justement, puisqu’on parle de Cécile Florin, ce sera elle qui, à partir de The Day I became a God, s’occupera de tous les doublages de Hiventy/Dubfiction pour la plate-forme, épaulée par différents comédiens très talentueux comme Erwin Grunspan (Mushoku Tensei Part 2), mais aussi Karim Barras, Daniel Nicodème et Gauthier de Fauconval (Les Mémoires de Vanitas Partie 2). Que dire sur ces différents directeurs artistiques, très expérimentés en raison de leur passif de comédiens, si ce n’est qu’ils ont globalement très bien fait leurs boulots, une fois de plus, avec des comédiens plutôt bien choisis, et que leur direction des comédiens est assez irréprochable, la plupart du temps. En ce qui concerne la traduction et l’adaptation, nécessaire à la VF, à l'exception de celle de Darwin's Game qui est réalisé par Ninon Masella, et de celle de The Detective is Already Dead, produit par Maud Gillet, l'ensemble des adaptations des textes pour les simuldubs ont été réalisé par Emmanuel Pettini. Dans l’ensemble, ces derniers font de l'excellent boulot, avec de textes tous de très bonnes factures, avec pas mal de très bonnes idées de temps à autre qui rendent le texte vivant et sans aucun doute très sympathique à jouer pour les comédiens.

    Justement, parlons-en des doubleurs. Sur ce point, les doublages d’Hiventy soufflent à la fois le chaud et le froid. En effet, si le nombre de comédiens pour leurs séries est globalement très satisfaisant, et que ces derniers sont impliqués et motivés, ce qui fait plaisir à entendre, un constat négatif se fait très vite à force d’écouter ces doublages, c’est que la plupart des doubleurs reviennent souvent d’un rôle sur l’autre au fil des simuldubs. On pourrait se dire qu’en soi, ça pourrait ne pas poser de problème si les comédiens n’étaient pas toujours placés sur les personnages principaux, mais malheureusement, cette règle n’est pas forcémment respectée. Par exemple, Marie Braam, une comédienne excellente que j’apprécie d’ailleurs, qui joue Shuka dans Darwin’s Game qui est un personnage très important au récit, se retrouve à jouer le personnage principal de Deca-Dence, Natsume. Pareil pour Maxime Van Stantfoort, qui joue Kaname, le protagoniste principal de Darwin’s Game, puis Muro dans Deca-Dence, le père de… Natsume !!! Cela dit, ce problème sera, par la suite, amélioré au fil des simuldubs grâce à un plus grand noyau de doubleurs participants à ces doublages, et ce, jusqu’à Mushoku Tensei, où l'on retrouve un grand nombre de comédiens qui ont déjà participé à d’autres doublages Hiventy pour Wakanim et qui sont suffisamment nombreux pour qu’on ne les remarque pas trop et qu’on puisse suivre avec plus ou moins grand plaisir la série. En autres soucis, qui est peut-être un faux problème pour certains, mais que je trouve assez discutable, le fait que le directeur artistique participe en tant que comédien à la série qu’il est censé diriger. En général, je tolère quand il s’agit d’un personnage secondaire, car sinon, autant brûler tous les doublages d’animés si je m’arrêtais sur ce point, mais dans le cas de The Day I Became a God, ce n’est pas 1, ni 2, mais 3 personnages secondaires que Cécile Florin interprète, et ça me pose problème, même si on peut se rassurer en se disant qu’un comédien présent sur le plateau a pu certainement le dirigé pour cela. Voilà pour ce petit coup de gueule envers cette pratique que je n’apprécie pas trop. Enfin, dernier point, la continuité vocale. Si contrairement au doublage de Drifters, Hiventy a su se débrouiller pour qu’il n’y ait pas de changement de voix sur leurs doublages, il y a un doublage qui a fait exception à cette règle, c’est le doublage des Mémoires de Vanitas. En effet, la valse des directeurs artistiques tout comme le planning dû au simuldub a eu comme conséquence inévitable des changements de voix assez drastiques. Si les personnages principaux ont été épargnés, ce n’est pas le cas des personnages secondaires. Luna, par exemple, passe de Raphaëlle Bruneau à Cécile Florin sans explication du pourquoi du comment. Louis de Sade, un autre personnage secondaire récurrent, doublé initialement par Fabian Finkels, se fait remplacer sur le rôle par Cécile Florin dans l’épisode 12, alors que pourtant, ce dernier continue de doubler de Dante dans le même épisode. Dans tous les cas, à partir de la seconde partie de l’animé, Gauthier de Fauconval reprendra le personnage, ainsi que Dante. Bref, pour les fans de Vanitas, c’est dommage que ce doublage ait été si mal géré à tous les niveaux, car c’est le seul de Hiventy et Wakanim qui pose problème niveau continuité vocale, et c’est bien dommage… 

Carton publicitaire de Wakanim pour le simuldub de Mushoku Tensei (janvier 2021)
 

 Voilà tout ce que pouvaient dire sur les doublages de Hiventy pour Wakanim. S’ils sont tous, à l’exception des Mémoires de Vanitas, tout à fait recommandables, notamment en raison de la qualité d’interprétation des comédiens, de l’adaptation très soignée réalisée par les traducteurs de Wakanim, et du nombre de comédiens très satisfaisant, ils souffrent en arrière-plan de castings assez limités, avec beaucoup de comédiens récurrents que l’on retrouve sur l’ensemble des simuldubs, ainsi que la manie, que je n’apprécie pas personnellement, mais que vous pouvez ignorer totalement, d’avoir des directeurs artistiques qui se retrouvent à faire plusieurs personnages secondaires de la série. Quoiqu’il en soit, à partir de mars 2021, avec la production de VF en augmentation sur leurs plates-formes, Wakanim fera le choix de s’associer avec un autre studio de doublage, français cette fois, à savoir VF Productions, en plus de mettre en chantier leur projet de studio interne, qui ne sera actif qu'à partir d’octobre 2021.

C- De 2021 à 2022, Wakanim et VF Productions

  En effet, à partir du 1er mars 2021 est diffusé par Wakanim un doublage français très attendu et demandé par nombres de personnes, à savoir celui de Demon Slayer, série réalisée par le studio d’animation japonais Ufotable, datant de 2019, et qui avait été un énorme succès surprise partout dans le monde. Pour l’occasion, la plate-forme a fait le choix de ne pas travailler avec Hiventy comme c’était le cas jusque-là, mais avec le studio de doublage français VF Productions, crée en 2005 par le comédien Yann Le Madic, connu pour ces différents contrats obtenus pour différentes chaînes de télévision française dont notamment TF1 (Perfect Match) ou Cartoon Network (We Baby Bears). En ce qui concerne l’animation japonaise, l’entreprise avait déjà eu l’opportunité, à de nombreuses reprises, de travailler avec Dybex sur le doublage de Fullmetal Alchemist Brotherhood (en remplacement du studios de Saint Maur qui avait produit l’infortuné 1re VF de la série avec François Créton sur Edward Elric, ainsi que les premiers épisodes du redoublage avec Arthur Pestel, Martial le Minoux et Audrey Pic), le film Fullmetal Alchemist : L’Étoile sacrée de Milos, les films Berserk, ainsi que le film Trigun : Badlands Rumble. Ils ont aussi eu l’occasion de travailler avec AB Distribution avec Angel Heart, quelques épisodes, doublés tardivement, de Patlabor, ainsi que Saint Seiya - The Lost Canvas. Enfin, c’est à noter, mais c’est ce studio qui est celui qui a récupéré les actifs, à savoir principalement les studios d’enregistrement, du défunt Studio Lincoln, disparue en 2011, qui s’était occupé de nombreux doublages d’animés notamment pour Déclic Images, et dont on peut retenir les excellentes versions françaises de Fruits Basket (la série de 2001), Hikaru no Go, Love Hina, ainsi que des OAV Jojo’s Bizarre Adventure. C’est donc avec ce passif, assez important, qui a fait que Wakanim, peut-être conseillé en partie par Dybex, ait confié ce doublage à ce studio. Par la suite, ils renouvèleront leur confiance sur le doublage d’Horimiya, sortie le 29 juin 2021 ainsi que sur le doublage du film Demon Slayer le train de l’infini, sorti au cinéma le 19 mai 2021. Par la suite, ils s’occuperont également de doubler le remontage de ce film en série télévisée, sortie début 2022 en VF sur Wakanim et enfin, de la suite de celle-ci, toujours en série TV, à savoir le quartier des plaisirs. Mais à part cela, c’est tout. En effet, très vite, dès l’automne 2021, c’est le fameux studio interne de Wakanim qui a éclipsé tous les autres, rendant le besoin d’appeler Hiventy et VF Productions limitées à la simple continuité de ce sur quoi il avait travaillé auparavant.  

  VF Productions fut donc un studio de doublage employé au final assez faiblement et brièvement par Wakanim par rapport à Hiventy/Dubfiction. Cependant, il me paraissait très important de parler, notamment car il a fait se rencontrer différentes personnes qui ont été impliquées dans la création du studio interne de Wakanim. Justement, attaquons-nous à la direction artistique. Que ce soit pour Horimiya comme pour Demon Slayer, c’est un seul directeur artistique qui s’en occupe, à savoir Yann Le Madic. Eh oui, le fondateur du studio en personne s’occupe de ces productions-là, et ce n’est pas étonnant sachant qu’il a de l’expérience et qu’il a pu avoir des occasions de travailler sur des animés japonais, que ce soit en tant que comédien et/ou directeur artistique sur les autres doublages de VF Productions, ou bien auparavant, en tant que simple comédien, notamment sur le second doublage du Château de Cagliostro, où il interprétait Lupin III, rebaptisé Wolf, souvenez-vous, on en avait déjà parlé ici. Bref, si certains choix de castings sont assez judicieux, et qu’il a le contact de pas mal de comédiens réputés dans le milieu du doublage, il lui arrive parfois de faire des erreurs sur certains comédiens, nous y reviendrons. En ce qui concerne les adaptations des textes, on peut noter que si la traduction de base est réalisée par les traducteurs de Wakanim eux-mêmes, comme chez Hiventy/Dubfiction, encore une fois à partir de leurs scripts qui leur servent à réaliser leurs sous-titres, l’adaptation en elle-même est réalisée par d’autres personnes, de VF Productions cette fois, à savoir Magali Barney (eh, attendez une minute, j’ai également parlé de toi aussi sur ce blog !!!), Mahsa Montero et Thibault Longuet pour Demon Slayer. Le film Le Train de l’infini, quant à lui, est adapté uniquement par Magali Barney, tandis que les simuldubs de l’adaptation en série télé de ce film, ainsi que de l’arc Le Quartier des Plaisirs, au contraire, ont été assurés de A à Z par Wakanim avec le traducteur VOSTFR de la série, à savoir Adam Plaza aidé par Sarah Leclère à la supervision. En ce qui concerne le doublage de Horimiya, si on retrouve Magali Barney une fois de plus, ainsi que Mahsa Montero, on a d’autres adaptateurs, à savoir Camille Cordival et Chloris Chardon, ainsi que Mathis Dodu et Sarah Flesh. Globalement, leurs textes sont plutôt bons globalement, même s’ils peuvent parfois manquer du génie que pouvaient avoir parfois certaines des adaptations des doublages pour Hiventy.

  Tout cela étant dit, passons à la question des comédiens. Étant donné que leur nombre est globalement assez important, qu’on a le droit à pas mal de comédiens très talentueux qui n’ont plus rien à prouver comme Eric Herson Macarel, Adrien Antoine ou Bruno Choël, que ce soit du côté des doublages de Demon Slayer, comme de celui d’Horimiya, on pourrait se dire que les voix secondaires sont excellentes que ce soit pour Demon Slayer. Cependant, quand on y regarde de plus près, on constate que de temps à autre, certaines voix secondaires sont en dessous du reste, notamment dans le cas de Horimiya où les ambiances manquent parfois d’un brin de naturel. Ce n’est pas honteux, mais ça traduit certainement un manque d’utilisation de comédiens « caméléons », capable d’être le plus discret possible pour le spectateur qui regarde.

  Évidemment, il me faut parler des rôles principaux aussi, alors commençons donc par Demon Slayer, avec le comédien qui interprète Tanjiro Kamado, le personnage principal à savoir Enzo Ratsito. Ce nom ne vous dit certainement pas grand-chose, mais retenez-le, il sera très important pour plus tard. Il faut savoir qu’à ce moment-là, il n’avait à son actif que quelques rôles sur The Seven Deadly Sins ainsi que les OAV de Jojo's Bizarre Adventure consacré à Rohan Kishibe. Ce qu’il faut savoir pour l’instant sur lui, en ce qui concerne Tanjiro, c’est qu’il se débrouille relativement bien, avec une voix qui colle assez bien au personnage. On peut noter cependant parfois qu’il a un peu de mal à gérer les respirations, mais ce n’est pas un point suffisamment dérangeant, pour peu que vous ne fassiez pas une fixette dessus. En ce qui concerne sa sœur, Nezuko, elle est interprétée par Margaux Maillet. Si son nombre de répliques dans la série est assez faible, je ne peux que noter son excellente prestation dans l’épisode 1 où elle comprend très vite le personnage qu’elle interprète, d’autant qu’ensuite, elle sait bien gérer sa respiration ainsi que les grognements de Nezuko une fois devenue démon. Du très bon donc. Pour ce qui est de Zenitsu, il est doublé par Maxime Baudoin, un comédien connu pour avoir interprété Hathaway dans le désastreux doublage de Gundam Hathaway Koga, le chevalier de Pégase, dans Saint Seiya Omega. Il est globalement plutôt bon dans le rôle, sans être particulièrement exceptionnelle. Cela dit, on sent qu’il a bien été casté sur le rôle, au contraire de Christophe Lemoine sur Inosuke qui était une fausse bonne idée du directeur artistique. En effet, si la voix qu’il prend, un peu similaire à celle que prend Cartman, colle parfaitement lorsqu’il a son masque de sanglier, dès qu’il retire ou se retrouve dans des postures moins caricaturales, on sent qu’il est un peu plus en difficulté, et c’est bien dommage, quand on sait combien ce comédien est apprécié de beaucoup de monde, moi compris. Ainsi, on peut conclure ce point en disant que le casting principal français de Demon Slayer s’en sort donc plus ou moins bien, avec d’excellentes bonnes surprises, mais aussi de fausses bonnes idées et quelques petites déceptions…

  Après s’être attardé sur le casting principal de Demon Slayer, attaquons-nous maintenant à celui de la VF d’Horimiya, et là, il y aura des choses à dire. Commençons par évoquer Camille Donda sur Kyôko Hori, la protagoniste. Celle-ci se débrouille plutôt bien la plupart du temps, elle a parfois des soucis à hausser la voix, ce qui peut poser problème, mais elle est dans le rôle, ni plus ni moins, et ne commet pas d’accroc particulièrement dérangeant. Elle a tendance cependant à être plus naturelle dans sa façon de parler par rapport à sa seiyu japonaise qui appuie certaines exagérations liées au dessin, pour moi, ça apporte un peu plus de réalisme aux situations, mais il est certain que cela ne sera pas du goût de tous. Attaquons-nous maintenant au cas de la VF d’Izumi Miyamura, l’autre protagoniste de l’œuvre. Il est doublé par Jim Redler, un comédien peu connu, qui avait débuté le doublage d’animé un an auparavant avec un rôle assez important, à savoir celui de Legoshi dans Beastars. C’est pour moi la plus grande réussite de ce doublage, il a vraiment compris le personnage, en sachant appuyer le côté discret et peu bavard du personnage à l’école (en dehors de ses relations avec Kyoko et Toru), et sa personnalité opposée quand il est en dehors, le tout, sans aucune fausse note notable. Franchement, je ne peux que le saluer, et espérer qu’on le retrouve sur plus de doublage d’animés à l’avenir. Pour ce qui est de Toru, justement, eh bien, c’est l’exact contraire, je ne suis pas du tout, mais pas du tout convaincu par la prestation de Simon Koukissa. Son jeu est trop lisse, trop léger, et passe à côté de ce qui fait tout le sel du perso, qui est déjà assez mis en retrait par l’animé, malgré son importance. Bref, c’est vraiment ma déception de la série. Enfin, concernant le doublage de Yuki Yoshikawa, je ne peux que saluer l’excellente prestation de Zina Khakhoulia, qui s’est très bien joué sur le côté déterminé et assez énergique du personnage, bien qu’elle est peut-être une voix un peu trop mure à mon goût pour le personnage. 

  Maintenant que nous avons évoqué tous les éléments clés de leurs doublages, faisons un petit bilan des travaux de VF Productions pour Wakanim. Si l’adaptation est globalement correcte sans être exceptionnelle pour autant, et que Yann Le Madic sait faire appel à d’excellents comédiens qui n’ont plus rien à prouver, il a parfois tendance à avoir de fausses bonnes idées sur ces doublages en ce qui concerne certains personnages, tout comme avoir des choix de comédiens assez tranchés qui ne plairont pas à tout le monde. C’est le cas sur Demon Slayer, mais surtout le doublage d’Horimiya. Ainsi les réactions, positifs comme négatifs, sur ces doublages, sont pour la plupart du temps assez justifié, si bien que vous pourrez apprécier comme détester en fonction de vos attentes en matière de doublage.

Publicité de Wakanim réalisé à l'occasion de l'annonce du doublage de la série (juin 2021).
 
 

  Quoiqu’il en soit, et quoi qu’on en pense en ce qui concerne leurs qualités, ces doublages auront permis à Wakanim de médiatiser, encore plus qu’avec Darwin’s Game, leurs versions françaises, que ce soit en ajout de catalogue comme en simuldubs, notamment par les différentes interviews accordées par les comédiens et le directeur artistique Yann Le Madic a des sites dont entre autres Allociné, mais aussi grâce aux nombreuses publications sur Tiktok du doubleur principal de Demon Slayer, Enzo Ratsito, qui s’est fait connaître avec ce rôle. Justement, c’est avec sa popularisation sur ce réseau social qu’il a répondu positivement à une offre d’emploi de Funimation, étant donné que la société américaine s’occupait désormais de l’embauche chez Wakanim depuis son rachat par Aniplex. Ainsi, il devint salarié de l’entreprise de SVOD, en participant notamment à l’élaboration du studio de doublage interne. C’est d’ailleurs en cette qualité-là qu’on lui confia, pour l’occasion, une première direction artistique, à savoir celle de la VF de Ranking of Kings. Mais tout ça, c’est une histoire que je développerais la prochaine fois, dans la dernière et ultime partie sur mon dossier bilan consacré aux doublages de Crunchyroll ou nous ferons un bilan final des différents doublages de l'entreprise.

  En attendant cela, je ne peux que vous remercier, vous tous et vous toutes, de votre lecture. Quand je vois chaque mois les statistiques de mes articles, et que je vois qu’elles atteignent assez aisément la centaine de vues, ça ne fait que me motiver toujours plus pour continuer à écrire chaque mois, un nouvel article, que j’espère, à chaque fois, qualitatif et pertinent. J’en profite d’ailleurs pour remercier une nouvelle fois mes relecteurs habituels, sans qui cet article serait illisible et écrit avec les pieds, avec des centaines de fautes de français par paragraphe. Franchement, merci infiniment. Je remercie également Kevin Stocker, traducteur et adaptateur freelance, pour Wakanim, Crunchyroll et ADN, qui a lu mon article à posteriori et m'a corrigé sur certains éléments où je m'étais factuellement fourvoyé. Sur ce, je vous dis bonne journée ou une bonne soirée, tout dépend de quand vous lisez cet article, et à dans un mois, pour la dernière partie de ce dossier d’été qui promet d’être explosive et éreintant pour moi.

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